Mon cher fils, mon cher Owen,

cela fait maintenant 21 mois que cette conductrice t'a percuté, t'a détruit, t'a écrasé comme un vulgaire animal, t'a volé ta précieuse vie ...

21 mois que nous sommes anéantis, que nous tentons de faire face, pour ton frère, ta sœur, pour tous ceux qui nous aiment et nous soutiennent,

21 mois que nous apprenons à vivre avec une blessure béante en nous, qui ne se refermera jamais, qui nous ronge de l'intérieur,

21 mois que nous attendons que cette femme ait à répondre de ses actes, de ses paroles indignes, et qu'il nous semble que la justice t'a oublié, nous a tous oubliés: cette instruction qui dure depuis déjà un an et demi et qui n'avance pas, la juge d'instruction qui semble t'ignorer, nous ignorer, qui ne répond pas à nos courriers, qui nous donne l'impression de te mépriser, de nous mépriser par son silence ...

Les victimes, directes ou indirectes, sont totalement ignorées, pire, nous nous sentons insultés, outragés même, lorsque la France s'émeut pour un "lancer de chat", et que l'auteur passe devant la justice dans la semaine suivant les faits, en comparution immédiate et écope d'un an de prison ferme, pour une patte cassée ...

Ta vie aurait-elle moins de valeur que la patte d'un chat de gouttière ? C'est le message que nous donne aujourd'hui la justice de notre pays ...

Oui, Owen, je suis en colère, nous le sommes tous, nous ne pouvons pas rester neutre, garder notre calme, dormir sur nos deux oreilles, quand on constate tous les jours, à la lecture des journaux, que les biens matériels, les animaux, l'argent surtout, ont plus de considération aux yeux des juges que la vie humaine au regard des peines prononcées. 

Oui, Owen, je suis indignée de l'indifférence dans laquelle on laisse encore au volant de leur voiture des conducteurs qui n'ont plus leurs facultés, qui roulent alors qu'ils n'ont pas leur pleine conscience, que ce soit sous l'empire de l'alcool, de stupéfiants ou de médicaments qui provoquent les mêmes effets, qui pourtant font l'objet d'une mise en garde sur la boite.

Oui, Owen, je suis désabusée quand j'entends qu'aujourd'hui, lorsque ta petite sœur demande à un gendarme venu sensibiliser sa classe à la sécurité routière s'il contrôle les conducteurs sous l'emprise de médicaments, ce dernier lui répond tout simplement "non", sans chercher à comprendre la raison de cette question, sans la moindre interrogation de sa part, je me dis que le chemin est encore bien long.

Oui, mon fils, je suis effondrée à l'idée que d'autres victimes innocentes comme toi périront encore sur les routes de France cette année, et les années à venir si la loi ne change pas, si la clémence dont bénéficient les meurtriers de la route ne cesse pas.

Tu nous manques, Owen,

Tu nous manques terriblement, continuellement, viscéralement ...